Création, performance et apprentissage ?

L'art est perpétuellement en crise et constamment remis en question. L'être humain, la société, en effet, s'observent, s'interrogent, se redéfinissent sans cesse aux plans biologique, psychologique, social, idéologique, spirituel.

L'art repose sur la nécessité d'une remise en question continuelle de ses plus profondes certitudes. Une telle exigence se double d'une nécessité d'autant plus grande de l'apprentissage d'une sécurité intérieure, d'une confiance en soi à toute épreuve, sans lesquelles création et performance ne peuvent venir à terme.

On attend des artistes, comme participants à la société humaine, qu'ils soient les maîtres d'une technique sûre, impeccable, mais adaptable à toutes les demandes; et en même temps, qu'ils développent leur propre style. Qu'ils se fassent conformes et cultivent en même temps l'originalité.

Or l'art n'est ni conformiste, ni adaptable. La pratique de l'art est un perpétuel apprentissage, qui va de pair avec la création de la liberté. D'où la difficulté particulière pour l'acteur, pour l'actrice, d'assumer leur identité et leur responsabilité d'artiste. Il s'agit de réconcilier en soi l'anarchiste et le citoyen modèle, le créateur et l'instrument, le sujet privilégié et l'objet de représentation. Chaque fois se trouvent soulignées la dualité de l'acteur, de l'actrice, et la valorisation théâtrale du conflit, de la tension, de la contradiction. Dualité et contradiction: art de la présence et de l'action, au théâtre?

Nécessité de la remise en question et de la sécurité intérieure; maîtrise technique et élaboration d'un style unique: liberté et contrainte sont des paradoxes vécus au quotidien qui ne peuvent trouver et créer du sens en art que dans le développement et la mise en action d'une conscience, qui n'est autre que celle d'un corps en mouvement dans l'espace, et en relation avec son environnement. La pensée peut-elle se libérer de ses ornières habituelles? Et l'art, témoigner d'un éventuel changement de paradigme?

En art, la conscience, c'est ce qui permet d`explorer l'inhabituel, de passer du connu à l'inconnu, de faire sien, de nommer un territoire inexploité. Ce territoire, pour les acteurs, c'est d'abord eux-mêmes, comme personnes humaines et comme incarnations d'un art millénaire. Un travail portant sur la conscience du corps en mouvement au théâtre peut aller beaucoup plus loin que l'élaboration d'un théâtre gestuel.

C'est l'occasion d'acquérir à la fois le sens du présent et celui de la tradition. Par cette recherche, les acteurs, héritiers d'un passé qui les habite, peuvent devenir les fondateurs d'un futur qu'ils intuitionnent. Leur quête d'absolu peut les amener encore à se dépasser: à la fois à se rejoindre profondément dans leur authenticité et à se joindre à la communauté humaine.

À propos de l'intégration de l'éducation somatique au travail scénique

• Le mouvement, c’est la vie (Moshe Feldenkrais)
• Oser revenir à soi
• L’apprentissage de la liberté
• Ce qui fait de nous des humains: sentir, imaginer, penser, agir
• Notre relation à la gravité
• Émotions et intentions au coeur du mouvement
• Oser aller vers l’autre
• Le corps, métaphore de l’esprit? L’esprit, métaphore du corps?

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